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Une faim sans fin

24 novembre 2007

Aie Aie Aie, la pesée

Ce matin, j'ai décidé de me peser, afin de mettre un chiffre sur ces rondeurs de plus en plus flagrantes. A ma sortie de la clinique, le 11 septembre, je pesais exactement 51 kgs. A l'époque, je n'en était pas satisfaite, j'aurais voulu avoir perdu plus de poids.

Ce matin, verdict: 58 kgs. A vrai dire, je pensais peser au moins 6O kgs. ça n'a toutefois pas été un soulagement. Sept kilos de plus en 9 semaines, c'est trop, trop, trop! Pourtant, ce n'est pas ce qui va m'empêcher de manger, malheureusement.

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23 novembre 2007

Encore raté!

Si seulement j'avais pu tenir, ne serait-ce que deux jours, non. Je n'aurais tenu qu'un jour et demi, et c'est reparti. vendredi après midi, je n'ai pas pu resister, il a fallu que j'aille faire des courses, et que j'achète ma glace à la menthe chérie. Je ne peux pas m'en passer, c'est dingue. Je me suis enfermée chez moi après mon retour et n'en suis plus sortie. Une fois le tout englouti, je me suis encore dégoutée. "Ma pauvre, tu n'est même pas capable de résister deux jours entier,tu n'as aucune volonté! comment veux-tu arriver à quelque chose!"

Et comme chaque semaine, je me dis que le déclic viendra le lundi suivant, qu'à partir de ce jour là, je serai plus forte, plus résistante. Mais au fond de moi, je sais que le jour n'a pas d'importance, que seule, je n'y arriverai pas, qu'il me faut de l'aide.

J'ai mon premier rendez-vous depuis m'a sortie de la clinique avec mon psy lundi prochain. Je compte lui demander une autre hospitalisation, qu'il m'accordera je pense. Après tout, je ne peux pas continuer comme ça.

22 novembre 2007

Aujourd’hui, je n’ai pas vraiment été actrice de

Aujourd’hui, je n’ai pas vraiment été actrice de ma propre journée. Après les insomnies de cette nuit, j’ai peiné à me lever. Ce n’est qu’à 17h00 que j’ai finalement émergé pour de bon, après quelques tentatives entre midi et 16h00. Coment définir ce que je ressens ? Je ne sais pas trop, je suis las voilà tout.

Je me suis tout de même épatée aujourd’hui. Je m’étais promis la veille de ne pas manger de la journée, histoire de compenser mes séances de goinfrage des jours précédents. Bon, c’est vrai, j’ai pas mal dormi, mais tout de même ! J’ai quand même ressenti la faim sur le coup des 19h00 alors j’ai avalé une boite de

250 g

de haricots verts avec du thé. Voilà tout. Je sais que ce n’est pas la solution et que c’est encore moins sain mais qu’est ce qui est sain chez moi ? Cela fait des années que je lutte pour que le rationnel prenent le dessus dans ma petite tête, en vain.

Ce soir, rebelotte, il est 3h00 du matin et je n’ai toujours pas sommeil, malgré avoir pris des somnifères. Alors je profite de ce temps, celui où je ne suis pas une loque, pour mettre mes affaires en ordre, bosser un peu mes cours, etc… Que faire d’autre après tout. J’aurais pensé être obsedée par la nourriture la nuit ; bien au contraire, c’est la nuit, au cours de mes insomnies que je suis la plus « saine », pas d’envie indomptable de chocolat ou de sucre. C’est plutôt bon signe. Si seulement cela pouvait durer !

21 novembre 2007

Faisons le point

Il est pas loin de 4h00 du matin, et je ne dors toujours pas; comme chaque soir, je rummine dans mon lit, ne songeant qu'à une seule chose: avoir un corps mince. Vous me direz que pour y parvenir, il me suffirait de faire attention, manger équilibré et faire un peu de sport. Cela s'applique bien entendu à la mademoiselle tout le monde, celle que je ne suis pas. Je pense que quiconque a eu le courage de lire mon préambule, si long soit-il, sait exactement de quoi je veux parler.

Si seulement c'était aussi simple: je décide de controler mes apports caloriques et je perds du poids. Malheureusement, rien n'est si facile. C'est pour moi un enfer quotidien que de devoir vider les placards chaque jour, et les remplir de nouveau, pour mieux les vider le lendemain. C'est ce à quoi je suis à nouveau rendue. Et oui, l'hospitalisation en laquelle j'avais tant d'espoir n'aura été qu'une illusion, l'illusion de m'en être sortie.

Le 11 septembre 2007, après plus de deux mois d'hospitalisation en clinique, je suis sortie pour reprendre ma vie où je l'avais laissée. Les cours ont repris, et le fait d'être replongée si vite dans le bain, de manière si précoce n'a fait que précipiter ma chute. Et s'est reparti pour un tour. Aujourd'hui, plus de deux mois et près de 10 kilos plus tard, je fais le point et me rends compte que je vais droit dans le mur. J'en suis conscience, mais me sens incapable de réagir, comme engluée dans mon propre destin, celui d'une jeune fille malade depuis une dizaine d'années maintenant. Je me dis que jamais je n'y arriverai, que jamais je ne m'en sortirai.

J'ai certes depuis quelques temps réalisé que les gens autour de moi devaient savoir; peut-être avais-je besoin de justifier mon comportement, chaque prise et perte de poids, etc... Et aujourd'hui, même raisonnement, je me dis que les gens liront ce que j'écris et ne me questionneront pas, car rien n'est plus difficile que de devoir en parler, devoir s'expliquer, se justifier.

Aujourd'hui, comme presque tous les jours depuis maintenant quelques années, je me suis adonnée à mon rituel quotidien. Manger, éliminer; manger, éliminer. il fut un temps où je parvenais à garder le controle de mon corps. Il m'était tout à fait possible de garder un poids acceptable, tout en me goinfrant comme je le faisais. Aujourd'hui, j'ai totalement perdu ce contrôle et je ne dirige plus rien. Le chiffre sur la balance ne cesse d'augmenter et je suis chaque jour un peu plus désespérée. Ce soir, comme chaque soir, je me fais la promesse de ne rien manger le jour suivant, histoire de faire basculer la tendance. Je devrais avoir honte de dire cela, mais au fond de moi, je souhaiterais tellement perdre le goût de manger, l'appêtit, ne plus y penser du tout. Je sais pertinnement que l'anorexie fait des ravages, mais je ne peux m'empêcher de penser que mon sort serait moins terrible. Rationnellement, je sais que c'est faux; seulement la boulimie tout comme l'anorexie ne sont en rien rationnelles.

Alors demain, je ne mangerai rien; je me le promets. Encore une promesse que je ne tiendrai pas. Comme les milliers de promesses que je me fais chaque année. Si seulement le fait de tenir ce journal pouvait marquer le déclic que j'attends depuis tant de temps, qui sait... on verra bien.

20 novembre 2007

PREAMBULE

Récit d’un combat qui s’annonce long et plein d’embuches

Par où comencer ? Je crois que le plus difficile, en fait, c’est de se lancer, de trouver les premiers mots, le  fil conducteur. Mon histoire à moi, c’est l’histoire, j’en suis certaine de milliers de jeunes filles, jeunes et moins jeunes d’ailleurs. Pendant longtemps, je me suis voilée la face : « mais non, pas moi, c’est autres que ça arrive ça. Moi, je suis une gourmande invétérée, rien de plus ! Un peu de volonté et j’en viendrai à bout de ces kilos ! ». Mais la réalité était toute autre. Elle l’est toujours d’ailleurs, et aujourd’hui, je me bats, je me bats contre cette maladie que j’ose nommer enfin sans honte : la boulimie. Me l’admettre à moi-même, ça, ça a été bien plus facile que de l’admettre aux autres. A partir du moment où vous vous ruez sur des kilos de nourriture pour vous sentir mieux, vous vous doutez bien qu’il y a un problème. Mais quelle honte ! En tous cas, c’est ce que moi j’ai ressenti toutes ces années, ces années passées à mentir, se cacher, trouver n’importe quel subterfuge pour me laisser aller à ma « folle, trop folle gourmandise ».

Cela ne m’a néanmoins pas empêché de poursuivre des études, presque normalement on va dire. Car lorsque vous avez un cours en amphi dans une demi heure et qu’une crise se profile à l’horizon… et bien au diable l’amphi. Et là, on prétexte la migraine, ou la nausée et on en profite pour demander aux copines d’assurer pour nous. En tous cas, c’est comme ça que j’ai fonctionné pendant mes trois années de licence LEA. Et puis pour le dernier semestre, avec ma meilleure amie, on s’est dit, pourquoi ne pas finir en beauté, au Chili ? Et c’était parti. Démarches effectuées, nous voilà rendues à l’autre bout du monde. Le hic, c’est que dans ma valise, je n’ai pas emporté que mes vêtements et mon nécessaire à maquillage. Ma boulimie elle aussi a fait le voyage, et gratuitement la veinarde !!

Jusqu’à présent, j’avais toujours tout caché à tout le monde, même à ma meilleure amie Karine. Bien sûr, elle était au courant de vagues problèmes d’ordre alimentaires dans le passé, problèmes que j’avais pris soin de résoudre, soit disant… Alors que faire quand vous vivez en colocation et que la crise alimentaire vous prend ? Ma Karine, elle n’est pas dupe, et ça n’a duré qu’un temps, jusqu’au jour où, suite à une engueulade due à mon vidage de placard, j’ai craqué. J’ai craqué comme jamais je ne l’avais fait auparavant. Je me suis confiée à ma meilleure amie, qui était loin de soupçonner l’ampleur des dégâts.

Suite à cet aveu, je me suis sentie soulagée ; alors pourquoi ne pas me soulager définitivement et en parler au reste de mon petit monde ? Avant le départ, j’avais crée un blog, chili con Karine, histoire de donner des news aux amis et à la famille. J’avais trouvé le nom original et ce blog nous permettait de raconter nos délires, nos fous rire, et aussi nos petits malheurs. C’est par le biais de mon blog que j’ai décidé de faire passer le message, en espérant qu’il soit lu par des personnes bien précises. Le message, le voici, tel qu’il a été publié :

« A travers ce message, je vais peut être en étonner plus d'un, en choquer d'autres, mais comme me le répètent les gens autour de moi, je ne devrais pas avoir peur de m'exprimer, ni même avoir peur du regard des autres (ce dont j'ai du mal).

Je ne sais pas trop par où commencer... J'ai intitulé ce message "Coming out" tout simplement parce que j'ai besoin d'extérioriser tout ce qui me pèse, tout ce qui fait que je ne vis pas normalement, sinon dans le mensonge; mensonge envers les autres mais surtout envers moi même. Ce qui me pèse et dont je vais vous parler, je le porte en moi depuis des années. Cela remonte au collège et depuis ce moment là, n'a jamais quitté ma vie, mon corps, mon esprit. Ma vie est devenue un enfer.

Depuis toute petite, j'ai toujours été boulotte et combien de fois en maternelle ou en primaire ai-je essuyé les remarques désobligeantes des camarades de e, remarques du genre "t'es trop moche", "bigleuse", "grosse vache", et j'en passe. Quand un enfant s'entend dire ça à longueur de temps, et bien il finit par le penser, et c'est ce que j'ai fait. Depuis toute petite, je me suis mis dans la tête que j'étais moche et grosse et j'en passe. Ces méchancetés, ces choses dites parfois même par ma propre famille ("et ben dis donc, on mange bien à la cantine!), et bien ça marque. Oh que oui ça marque...

Avoir confiance en moi? Je n'ai jamais connu ce sentiment, jamais. Je me souviens d'un jour, ma mère m'avait envoyé acheter des cigarettes et je ne voulais pas y aller toute seule. Ce jour la je me suis entendue dire que j'étais godiche. Non, je n'étais pas godiche, j'essayais d'éviter au maximum le regard des autres, parce que j'étais "grosse" et "moche".

Et pour combler ces angoisses, je mangeais. je me rappelle très bien rentrer chez mon papi en sortant du collège, et y rester jusqu'à ce que ma maman débauche, en général tard. Quand j'arrivais chez mon papi, le goûter m'attendait. J'ai encore en mémoire la marque des gâteaux que mon papi achetait. Ce n'était pas "un" gâteau que je mangeais, mais quatre voire cinq et tout ça arrosé d'un bon demi litre de coca, chaque jour. A cette époque là, on me disait gourmande.

Et puis un jour, ce besoin de me remplir, pensant noyer dans mon estomac mes angoisses et mon ressentiment s'est accru. Dès lors, chaque jour, en sortant de l'école, je m'arrêtais au supermarché qui se trouvait sur mon chemin, acheter toutes sortes de cochonneries, que je mangeais sur la route. Je me débarrassais ensuite des papiers. Je crois que c'est à partir de ce moment là que le tourbillon s'est mis en route.

Cette periode, celle du collège, je l'ai très mal vécue, ronde et mal dans ma peau, je me renfermais sur moi même. Je n'avais pas vraiment d'amis, peut être quelques copines, mais une vrai amie, comme j'en ai une aujourd'hui, non, et je ne parle pas des petits copains... La période collège et lycée fut un enfer pour moi. Je me rappelle que mes parents m'avaient offert un scooter pour mon brevet des collèges. Et lorsque je l'ai eu, je me suis mise à pleurer, je n'en voulais pas et mes parents l'ont très mal pris. Mais si je n'en voulais pas, c'est tout simplement parce qu'au lycée, je rasais les murs, je fuyais le contact avec les autres, avec la foule. Chaque fois que j'arrivais au lycee entre midi et deux, il y avait toujours du monde qui attendait à la grille, idem pour le matin. Moi, je restais à l'écart, attendant que la grille s'ouvre. Avec un scooter, lorsque tu arrives au lycée, tout le monde te regarde, insupportable pour moi. Refuser de prendre le bus non plus, n'était pas un caprice, c'est juste que c'était plein de colégiens et lycéens, et donc des dizaines de paires d'yeux braqués sur moi.

J'ai toujours été mal dans ma peau et faute de trouver du réconfort autrepart, je l'ai trouvé dans la nourriture, une fois encore. Pour calmer ces angoisses et ce mal être, je mangeais et mangeais et mangeais. Combien de fois ma mère à pu me reprocher d'avoir vidé les paquets de gateaux du placard, ou les mousses au chocolat dans le frigo. Malheureusement, elle n'a jamais creusé plus loin; pour elle, s'était tout simplement de la goinfrerie. Et bien non, c'était juste moi, essayant d'appaiser mes angoisses. Angoisses qui persistent encore aujourd'hui, trop même.

Passionnée par les Etats-Unis, une fois mon bac en poche, je suis partie une années entière, en tant qu’étudiante d’échange. Et oui, j’ai pris mon envol, quitté bpapa et maman ! Durant mon séjour au Etats Unis, cela s'est empiré. Comme tout le monde le sait, les US, c'est un peu le pays des gros; et par chance, la petite boulotte en France était considérée comme normale là-bas. Alors pourquoi se priver de toutes ces bonnes choses que t'offre la terre de l'oncle Sam? Hein, pourquoi? J'en ai alors profité, fast foods, glaces, donuts, et j'en passe. Seulement, au retour, les kilos se sont affichés sur la balance, me laissant encore plus désespérée que j'aimais.

Et là, j'ai décidé que je devais contrôler mon poids. Seulement ce besoin de me remplir (ne nous voilons pas la face: ces crises de boulimie) était toujours d'actualité. Alors pourquoi ne pas essayer de manger mais tout en perdant du poids. C'est en regardant un reportage sur les désordres alimentaires que m'est venue l'idée de "me purger" après chaque prise. Et voilà, c'était parti.

Ma prmière année de fac, je ne sortais pas, mis a part mes têtes à tête avec Karine, mameilleure amie. Le reste de temps, je restais cloitrée chéz moi à manger et me purger après. A la fin de ma première année de fac, j'ai comme qui dirait "pété un cable", je n'en pouvait plus. il fallait qu'on m'aide, j'étais fatiguée de cette vie sans but, mis à part le goinfrage quotidien que je m'infligeais. A la fin de ma première année de fac, j'ai été hospitalisée dans une clinique, maison de repos. Malheureusement, je ne pourrait pas vous en dire plus de ce côté là, car bizrrement, de cette période, je ne garde aucun souvenir. Il semble que j'ai tout occulté: mes lectures (j'ai passé tout mon été à lire mais je ne me souviens de rien), mes séances avec le psy. Un psy vous dira certainement que le fait d'avoir tout occulté a un sens. Je ne sais pas trop en fait.

Au cours de ces deux mois d'hospitalisation, j'ai perdu pas mal de poids, j'ai découvert une autre facette de ma personnalité, une facette plus gaie, plus extravagante, à tel point que j'ai cru en être guérie. Oh que non, à peine sortie de la clinique, me voyant avec un corps mince, je me suis dit, à tord, "tu es mince", tu peux donc te premettre de manger ce que tu veux. Oui, je me permettais ce que je voulais, mais hors de quetion de reprendre du poids, alors je ne vous fait pas un dessin. Après chaque crise: les toilettes.

Jusqu'au jour d'aujourd'hui et aujourd'hui encore, ce n'est pas moi qui gouvernait ma vie, mais la nourriture. Cette nourriture qui me hante depuis des années, et dont je souhaite aujourd'hui désespérément me débarrasser. Rien n'est facile mais vivre dans le mensonge comme je l'ai fait depuis des années, ça je ne peux plus. C'est pour ça que j’écris ceci, parce que je veux que vous sachiez que lorsque je dis que je suis grosse, ce n'est pas pour m'entendre dire :"mais non, quelle bêtise!", je le pense sincèrement.

Ici, au chili, le mal du pays et le fait que ma famille me manque a fait que les choses se sont empirées, au point que je fasse quelque choses que jamais je n'aurais imaginé faire; j'ai tout raconté à karine. Elle ne soupçonnait rien de tout cela. Le fait de lui avoir parlé m'a énormément aidé, au point que je suis allée chercher de l'aide auprès d'un psychiatre ici, le docteur Castillo, qui après Karine, est la personne que je fréquente le plus désormais. Le docteur est très inquiet pour moi, au point d'envisager de me faire rapatrier. Et comme il est hors de question que je n'aie pas ma licence, je lui ai dit que ça devrait attendre la fin du mois, après la fin des cours. Il m'a mise en garde contre les effets des vomissements et s'est montré en faveur d'une hospitalisation ici, au Chili. Mais comme je n'en ai pas les moyen et comme surtout j'aigrave la trouille de me faire hospitaliser dans un pays qui n'est pas le mien, il m'a proposé un petite cure de sommeil, histoire de me reposer un maximum, et ne plus penser à la nourriture.

Car à chaque vomissement que je m’inflige, selon les spécialistes, je risque ma vie, une rupture de l’œsophage et une hémorragie interne sont si vite arrivées…

Là, je suis en train de vous écrire alors que je devais être au lit; a vrai dire, ces cachets ne me font aucun effet, mis à part que je fais enfin de bonnes nuits complètes. je vais retourner le voir cet après midi, pour qu'il me donne autre chose. Car quitte à rester enfermée à la maison avec un certificat médical, je préfèrerais dormir plutôt que de tourner en rond, angoissée à l'idée de savoir que je n'ai rien à manger à la maison.

A travers ce message, qui à mon avis, sera lu par les membres de ma famille, mais aussi par d'autres personnes, j'espère que vous me comprendrez enfin et ne me jugerez pas; parce que ce que les gens pensent de moi compte beaucoup pour moi. C'est malheureux à dire, mais la nourriture et l'opinion des gens sont ce qui compte le plus pour moi.

Le psychiatre ici m'a d'ailleurs dit que ça faisait 22 ans que je vivais pour les autres, à travers le regard des autres et non pour moi. Il a aussi ajouté que tant que je ne serais pas capable de m'accepter telle que je suis, je ne serais jamais heureuse, jamais en paix avec moi même.

A mon retour de Valparaiso, début juillet, j'envisage sérieusement une nouvelle hospitalisation, d'au moins deux mois, histoire d'essayer de me libérer de mes démons, de cette nourriture qui me hante... nourriture qui selon le docteur Castillo, n'est que le symptôme d’un mal beaucoup plus profond, beaucoup plus lointain, qui remonterait à l'enfance. Selon lui, ce n'est qu'à travers une longue psychothérapie que je réussirai à me débarrasser de ce mal être de ce sentiment de ne rien valoir, de n'être bonne qu'à me goinfrer.

Je crois que le fait d'écrire ces mots est pour moi une sorte d'exutoire, qui sans m'en rendre compte me soulage. Savoir qu'enfin les gens sauront par quoi je passe. Et je vous en prie, papi, papa, mamie, maman et les autres, ne me jugez pas. J'ai besoin de votre soutien, de vos encouragements. Papa, je sais ce que tu pense de cette hospitalisation, mais avais tu la moindre idée de ce par quoi je passe depuis des années? J'espère qu'à travers ce message tu réussiras à me comprendre. Acceptez moi comme je suis, même si moi même je ne le conçois pas.

Merci d'avoir lu ces "longs aveux". Je me sens désormais un peu plus légère, peu être le fait de m'être confiée, même si c'est à travers ce blog. J'ai vraiment besoin de votre soutien et de vos encouragements.

Je vous aime.

Les réactions et commentaires ne se sont pas fait attendre. Mes amies, ma maman et autres membres de ma famille, exceptée une personne, mon père. Pérennant-il le temps de lire les quelques articles que sa fille publiait ? Avait-il un quelconque intérêt pour ce que sa fille faisait à l’autre bout du monde ? Je n’en sais trop rien.

Et puis mon état de santé s’est empiré, les crises se suivaient et se ressemblaient toutes. J’ai aussi enfin osé demander de l’aide, de l’aide auprès d’un psychiatre chilien. Vous imaginez, expliquer votre mal être à un « étranger », dans un pays étranger. Il m’a d’ailleurs fait la remarque : « Dis moi, ne trouves-tu pas bizarre d’attendre d’être à l’autre bout du monde, loin de tous pour crier à l’aide ? ». Et il avait raison, j’avais attendu de me trouver dans un endroit où personne ne me connaissait, où je restais anonyme, ce qui selon lui n’était pas anodin, et traduisait clairement le fait que même ayant appelé au secours, je n’assumais pas ma maladie. « Sinon, m’a-t-il dit, tu l’aurais déjà fait il y a un bon bout de temps, chez toi, auprès des tiens, non ? ». Ce psychiatre, je le voyais plusieurs fois par semaine (ce qui normalement n’était pas possible, à la faculté, il était là en cas d’urgence, et non pour un suivi hebdomadaire), prenait un traitement anti compulsif qui, malheureusement, n’a modifié qu’une seule chose : la situation de mon compte en banque. Car au Chili, les « remedios », ils sont très « chéros », et la carte vitale, ils ne prennent pas. (petite note d’humour !).

Alertés par le psychiatre, les membres de la direction de l’université de Playa Ancha, ont jugé meilleur pour ma santé que je soit rapatriée d’urgence, pour me faire hospitaliser en France. Comme avant le départ, on nous avait bien gentiment forcé à souscrire à une assurance internationale hors de prix, je les ai contacté. Et pour m’entendre dire quoi ? Vous voulez vraiment le savoir ? « Désolée mademoiselle, nous ne prenons pas en charge les problèmes d’ordre psychiatriques. Mais n’hésitez pas à nous appeler pour parler si besoin est » Je t’en mettrai moi des « si besoin est », connasse ! Alors, en fait, l’assurance que nous avions souscrite, en gros, ne nous couvrait, un, qu’en cas de décès (auquel cas, on ne reclamerait pas grand-chose) et deux, en cas d’accident grave, ce qui, selon moi, n’arrive qu’une fois sur je ne sais combien. Ah, si je ne sais pas quoi faire de ma vie, je pourrais toujours me reconvertir dans les assurances ! Eux, ils y arriveront toujours, espèces de charlatans.

Pressée par la faculté de renter vite fait bien fait chez moi (et bien oui, il ne veulent pas se retrouver avec une mort sur la conscience en cas d’hémorragie due aux vomissements répétitifs), je me suis résignée. Puisqu’on me disait, vas-y, casse toi, dégage, va te faire soigner chez toi, je me suis mise en quête de changer ma date de retour. Une merde après une autre, je m’entends dire que la date de départ n’est pas changeable pour des raisons que mon espagnol ne me permet pas de comprendre. La seule solution, racheter un autre billet. En avant ponpon, après tout, si la santé oblige… Par chance, ou plutôt, par miracle, ma carte bancaire est gentiment passée, avec un paiement de 1800 euros pour un aller-retour Santiago-Paris. Je m’en fous de leur retour, je ne veux que renter chez moi !! « Mais mademoiselle, soyez rationnelle, un billet d’avion aller-retour vous coûtera toujours moins cher qu’un simple aller ». Ben désolée, avec toute la rationalité dont je dispose, j’ai du mal à voir la logique du truc.

Enfin bref, j’ai remis les pieds sur le sol Français mi juin, un bon mois avant ma date de retour fixée au départ. A mon retour, mon comportement alimentaire a quelque peu changé. Certes, je continuais à me goinfrer et à enfler comme une baleine, mais je ne me faisais plus vomir, ou que très rarement. La raison de ce changement, je vivais sous le même toit que ma maman et jamais je n’envisagerait de me faire vomir en présence de quelqu’un. Voilà un autre acte que je n’assume pas, parmi tant d’autres.

Dès mon retour, nous avons fait les démarches nécessaire pour une hospitalisation en clinique. Mais les places sont chères et les listes d’attente longues. Alors je passais mes journées vautrée dans le canapé familial, à déprimer, manger, déprimer, manger… Je ne m’habillais même plus à ce stade. Me laver ? Il m’est arriver d’oublier ; pff, de toute façon, c’était bien le dernier de mes soucis. Je ne voyais personne, personne ne me voyais. Tout le monde était content, enfin presque.

Mon père m’a proposé à plusieurs reprises de venir passe un week-end chez lui et sa future femme. Ma cousine Marine, aussi. Je le leur avais promis à tous de me montrer chez eux ; mais impossible, je ne me supportais pas, avec dix kilos de plus, je ne souhaitais voir personne. Mais ça, aujourd’hui, je réalise que les gens ne le comprennent pas : le fait que quelqu’un aille mal, pour d’autres, ce n’est pas envisageable. « Tu vas mal ? Et bien bouge toi un peu, viens nous voir, ne te renferme pas ! ». Mais c’était justement la seule et unique chose que je souhaitais, me cloitrer, ne voir personne. Je crois n’avoir jamais été aussi mal.

Et puis bingo, le dossier d’entrée en clinique à remplir pour enfin entamer ce que j’ose espérer être le chemin de la guérison, la fin de ce cauchemar que je vis depuis des années et que je ne peux plus supporter. Je suis donc entrée quelques jours plus tard, le 16 juillet exactement à « la villa du parc », un établissement thermal et psychiatrique à la fois.

Oh grand Dieu que le mot « établissement psychiatrique » fait peur !! Combien de fois ai-je entendu, « Tu ne vas pas faire comme ta mère, des séjour à répétition dans ta maison de fous ». Ces gens là, j’aurais envie de leur dire que s’il venaient psser un peu de temps dans cette « maison de fou », ils se rendraient compte que beaucoup d’entre les patient sont bien plus sains d’esprit qu’eux-mêmes !

C’est alors qu’a commencé mon séjour qui s’annonce long et plein d’embuches, tout comme le combat que je tente de mener, ce combat qui peut-être me permettra de tuer ce démon intérieur, celui qui me pousse frénétiquement à me jeter sur la nourriture, pour ensuite me faire culpabiliser, au point que je dois tout expulser ; expulser toute cette nourriture de mon corps, cette nourriture de la honte. « Oh, quelle goinfre tu es, me dis-je intérieurement, tu devrais avoir honte, honte de toi, honte de te montrer ; de toute façon, personne ne t’aime, tu es grosse et moche, comment veux-tu qu’on t’aime ? »

A

LA VILLA

DU

PARC

A mon arrivée à la villa, j’ai un entretien avec la psychiatre qui remplace mon psychiatre en vacance. Ça commence bien ! Je lui confie en pleurs ma détresse, qu’elle perçoit très bien. Après une bonne demi heure d’entretien, elle m’escorte hors de son bureau et m’invite à allar faire mon entrée informatique, avant de rejoindre ma chambre. Cet univers là, je le connaît assez bien. Je ne dirai pas que je me suis sentie dans mon élément mais tout ceci était un peu familier pour moi. J’avais déjà été hospitalisée en 2004, suite à une dépressiondue essentiellement à un manque d’estime total de moi ainsi qu’une phobie sociale.

Depuis mon arrivée, j’ai eu de bons jours, des jours moins bon et d’autres encore pire…

J’ai eu ma dernière crise de boulimie jeudi soir. Il faut dire que celle-ci, je l’avais préparée ! J’avais passée toute mon après midi en quête de nourriture, comme toutes les autres d’ailleurs, afin de combler toutes ces crises et ces appels, non pas de mon estomac, mais de mon démon intérieur, celui qui régit ma vie depuis des années. Mais je ne sais pas pourquoi, celle-ci a été plus lourde de conséquences que les autres. Un trop plein peu être, un ras le bol. Je me suis dit ce soir là, ce sera la dernière. Mais je me le suis tellement répétée que j’ai parfois du mal à y croire. Après chaque crise, la culpabilité aidant, je me disait que ce serait terminé, que le lendemain serait un jour nouveau, un jour sans crise, sans besoin de nourriture, sans besoin de gavage pour se sentir apaisée. Et en réalité, est ce vraiment un apaisement que je ressent à ce moment là ? Je ne sais pas. Plutôt le comblage d’un vide, vide de quoi, il me faudra trouver la réponse, car celle-ci, je ne l’ai pas encore, comme tant d’autre d’ailleurs.

Le vendredi, j’ai eu mon premier entretien avec Sylvain, l’infirmier psy à qui j’ai fait part de mon mal être et de mon besoin d’en finir avec cette maladie de « merde » qui me pourrit la vie depuis des années. J’en ai même pleuré, je me suis trouvée pathétique sur le coup. Quand je pense que tellement de gens meurent de faim et que moi, mon seul souhait serait d’arrêter de manger ! Aujourd’hui, j’ai accepté de demander de l’aide et je veux guérir, je veux m’en sortir, ne plus être gouvernée par cette bouffe qui m’obsède. Parce que je suis quelqu’un de secret, qui parle peu et j’ai dû prendre sur moi toutes ces années, ces années de souffrances, de régimes yoyos pour donner le change. Cette nourriture, c’est mon compagnon de vie. J’en rêve encore les nuits, je rêve de choux à la crème, de chocolats, de glaces et de tous ces plaisirs interdits que je me suis tellement permis durant toutes ces années. Mais là, je veux dire stop, stop à ce démon qui siège en moi et me dit que faire et quand le faire ! Quitte à rester enfermée deux mois ici, quitte à souffrir le martyr de ne pouvoir engloutir le moindre aliment « interdit », je veux tenter ma chance, mettre toutes les chances de mon côté pour parvenir à mes fins et repartir sur de bonnes bases.

Car au départ, au début de l’hospitalisation, je n’ai pas joué le jeu. Je pensais que la période des perfusions m’apaiserait et me permettrait d’oublier ce à quoi je n’ai cessé de penser toutes ces années. Et bien non, loin de là. J’avais beau avoir l’aiguille dans le bras et voir ce liquide censé me détendre se glisser dans mes veines, je ne pensais qu’à une seule chose, manger. Et contre le règlement, je m’échappait, chaque après midi, pour faire le plein, rentrer ensuite et me goinfrer comme une vache, en cachette, dans l’obscurité de ma chambre. Car je ne suis qu’une vache qui ne pense qu’à « bouffer », se remplir, pour ensuite, par peur de se « vachiser » un peu plus, restituer le contenu de ce que j’avais avalé. Oh, je sais qu’on en garde toujours un peu à l’intérieur. J’ai vu comment mon corps a changé ces derniers mois, ces mois où ma folie alimentaire a redoublé de plus belle. Aujourd’hui, ce corps, je ne le supporte plus, je voudrais qu’il ne m’appartienne pas. Je rêve de minceur chaque jour. Si seulement je pouvais retrouver le contrôle de mon corps. Je dévore ces magazines qui vantent toutes sortes de produits amincissants, drainants, qui vous montrent ces top model « photoshopées ». je sais que tout ceci est malsain, que je devrais m’insurger et ne plus lire ces torchons mais je suis comme les milliers de jeunes filles qui ne rêvent que d’une chose, ressembler à ces Noémie Lenoir, Lindsay Lohan et compagnie.

Car oui, avant, j’en avait le contrôle de ce corps. Mes crises était bien là, mais plus espacées. Je m’octroyais quelques repas équilibrés entre les deux. Je compensais par du sport, ce qui me permettait de garder la ligne. Mais c’était il y a déjà plusieurs mois, presque un an déjà. Je ne dirais pas que je me complaisais ainsi, mais je ne sentais pas la situation aussi critique qu’aujourd’hui. Je me disais que tant que je pouvais donner le change, je pouvais encore m’en sortir par moi-même. Qui sait, ces crises se seraient peu être envolées du jour au lendemain… Car je dois être honnête, si j’ai toqué à la porte du psy pour demander de l’aide , c’est à cause de ce corps que je ne peux plus voir, sentir, toucher. J’ai enfin osé demander de l’aide ; certes pour les mauvaises raisons, mais je l’ai fait. Et aujourd’hui, je voudrais tuer ce mal qui prolifère en moi. Je ne veux pas qu’il grandisse ; au contraire, je voudrais le réduire à néans, être plus forte que lui. Je sais que la bataille sera longue mais je veux m’accrocher, je veux essayer d’être forte. Tant d’autres ont réussis à s’en sortir, alors pourquoi pas moi, pourquoi, ne pourrais-je pas y arriver moi aussi. Ne suis-je pas aussi normale que les autres. Bon, normale n’est pas le terme à employer, car si je l’étais vraiment, je ne serais pas ici, à

la Villa

, en train de taper ces mots.

Depuis jeudi, pas de crise (c’est peu mais j’ai l’impression que cela fait une éternité). Je ne dis pas que le besoin ne s’en ai pas fait ressentir, au contraire, j’y pense presque chaque instant, chaque minute ! Mais j’ai choisi de rabattre mon anxiété et mon angoisse sur de la lecture. Depuis trois jours, je dévore les pages des romans que je termine avec fierté. Demain matin, lundi, après trois jours de sevrage « boulimique », je vais affronter la balance. Cette balance qui a été ma colocataire la plus fidèle durant mes années de facs à

La Rochelle. Pesée

avant et après chaque crise. Et si le poids n’était pas le même voire inférieur, opération cuvette, encore et encore. La semaine dernière, elle affichait 57,7 kgs, une horreur. Qu’ils sont loins mes 50 petits kilos chéris ! Et surtout mon ventre plat, qui me manque tant. Mais ces trois derniers jours, j’ai joué le jeu à fond, comme pour rattraper mon « hypocrisie » du début. Ces trois derniers jours, donc, j’ai chaussé mes chaussures de sport chaque matin après le petit déjeuner, et suis allée, chaque fois une bonne heure, alterner la marche et la course. Il est vrai que j’ai plus marché que couru mais c’est l’intention qui compte comme on dit ! Et puis il faut dire que ce sont les débuts. Le sport, je l’avait laissé tombé il y a déjà des mois, alors il me faudra être patiente avec moi-même et avec mon corps. Alors demain, j’aurai le verdict. Je serai tellement déçue et anéantie si le chiffre affiché par la balance était supérieur. Je n’aurais qu’à m’en prendre à moi-même mais tout de même… j’ai essayé de me racheter une conduite ces trois derniers jours, et à quels efforts !! Des efforts qui pour quiconque ne représenteraient rien mais qui pour moi étaient presque surhumains.

Aujourd’hui, en panne de lecture, je me suis acheté un nouveau roman, celui de Jean Michel Cohen, le roman des régimes. J’en ai déjà lu une bonne centaine de pages et j’avoue que c’est une histoire qui ne pouvait pas mieux me concerner, celle des troubles du comportement alimentaire. Celui-ci non plus ne va pas me durer très longtemps. Mais si lire me permets d’oublier ne serait-ce qu’un petit peu ce à quoi je pense tant, alors j’en redemande !

Car mon Dieu, que c’est dur ! Je sais, je l’ai déjà dit, je me répète, mais ma maladie n’est elle pas elle non plus une incessante répétition de compulsions alimentaires ? Un incessant mal être, une envie de disparaître, d’être invisible ? Moi, l’invisibilité, je l’avais trouvée. Ces dernières semaines, je ne sortais plus de chez moi, mis à part « à l’arrache », pour m’approvisionner et avoir de quoi assouvir mon vice. C’est tout juste si je m’habillais. Non, maintenant que j’y pense, je ne m’habillais même pas. Me laver ? Peut être une fois tous les deux jours, par culpabilité et parce que j’ai toujours détesté les gens sales. Je ne voulais pas devenir comme eux, mais c’est ce que j’étais en train de devenir. Le laissé aller m’avait gagné et j’avais touché le fond.

Et puis le sésame est arrivé, l’acceptation à

la Villa

du parc ; pour moi le signe d’une, je l’espère, guérison. Du moins, une aide, un soutien et des efforts dans ce sens. J’ai eu à mon arrivée un entretien d’accueil avec Muguette, avec qui j’ai accroché et avec qui j’espère pouvoir faire des progrès. Elle m’a parlé d’un atelier qu’elle animait, qui pourrait peut être m’aider à accepter un peu plus mon corps. Je me le suis donc fait prescrire. Cette fois ci, je n’ai rien à perdre, ou plutôt, tout à y gagner et je veux gagner, je veux m’en sortir. J’ai aussi demandé au psychiatre remplaçant de me prescrire la gymnastique. J’ai besoin de voir mon corps perdre cette graisse amoncelée et que je hais tant. J’ai besoin de me voir retrouver une forme humaine, acceptable, non pas aux yeux des autres, mais aux miens. Non pas que le regards des autres ne me dérange pas. Au contraire ! C’est ce qui régence ma vie depuis toute petite. Que va-t-on penser de moi ? J’ai essuyé tellement de moqueries qu’aujourd’hui, j’ai beaucoup de mal à m’ouvrir aux autres, à m’exposer. Je suis solitaire par dépit, non pas par envie. J’aimerai tellement être enjouée, insouciante, pleine de vie, sans complexe. Mais non, j’ai ce boulet avec moi. Non, ces boulets. Primo, ce corps que je me traine et qui me gène, dont j’ai honte, et deuxio, les complexes que cela entraine.

J’ai demain mon premier entretien avec la psychologue, qui, je l’espère, m’aidera. J’aimerai qu’elle lise ces pages, afin de comprendre et surtout se rendre compte de ma souffrance. J’ai beaucoup de mal à exprimer ce que je ressens verbalement. Je suis tellement plus à l’aise à l’écrit. Les mots me viennent tellement plus facilement, comme un écrivain qui se sentirait inspiré pour le roman qu’il s’apprête à publier. Sur papier, je peux me confier, sans avoir peur de la réponse ou de la réaction de mon lecteur ? Peut-être est-ce timide ou plutôt lâche, je ne sais pas trop. Pour l’instant, c’est le moyen avec lequel j’ai le plus d’aisance à m’exprimer. Peut être cela changera-t-il un jour…

Ce matin, nous sommes lundi et comme promis, j’ai eu droit à ma pesée. Dieu sait que je l’ai attendue celleé-là. mais j’ai peur, pourquoi ? Pourquoi devrais-je avoir peur d’une petite , machine électronique de rien du tout ? La réponse, je l’ai ; cette machine, comme je l’appelle, c’est toute ma vie. Il suffit que je monte dessus pour qu’elle me dise qui je suis. Si le chiffre n’est pas à la hauteur de mes espérance, c’est que je ne suis rien, ne vaut rien ; par contre, si le chiffre indiqué a diminué, alors là, il y a espoir… peut-être suis-je ou serai-je bonne à quelque chose un jour. C’est dingue quand j’y pense, cette obsession de la balance. Rationnellement, je sais que je suis stupide de ne vivre que pour mon poids, mais j’ai enfin réussi à l’admettre, je suis malade, atteinte de troubles de comportement alimentaire. Je l’assume sans trop l’assumer. Je veux dire par là qu’à la clinique, je n’ai pas de mal à en parler car beaucoup sont là pour ça et les autres, et bien ils ont leurs problèmes, parfois pires. Par contre, dans le cercle familial, il m’est rès difficile d’en parler ouvertement. Voilà la raison principale de ces écrits. Bon, revenons à nos moutons, cette fameuse pesée du lundi matin ; et bien je dois dire que je ne suis pas anéantie comme je le craignais mais il n’y a pas de quoi sauter au plafond. Ce matin, a jeun, 57,6 kgs. Une maigre perte de

100 grammes

. Enfin, l’essentiel, c’est que le chiffre soit en baisse, non ? J’aurais tellement aimé perdre un peu plus mais avec toutes les crises de ces dix derniers jours, il ne fallait pas que je m’attende à un miracle. Ici, il y a des remèdes mais pas de miracles !

A la salle de pesée, je rencontre Michelle, elle aussi venue voir l’ampleur des dégâts. Elle est plutôt satisfaite. Michelle, c’est ma voisine de table. C’est bien plus que ça en fait. Le jour de mon arrivée, c’est un peu celle qui m’a accueillie. On a très vite sympathisé et je l’apprécie énormément. Ce matin, elle m’a proposé de venir marcher avec elle. Mais attention, pas une marche de mémé, au contraire, d’un bon pas, histoire de brûler les calories nécessaires à mon « combat ». Nous y sommes d’ailleurs allées hier, avec l’intention de parcourir une bonne distance, seulement le temps en avait décidé autrement ! Nous sommes donc parties ce matin à neuf heures, pour une marche d’une heure trente. Qu’est ce que cela fait du bien ! Qu’est ce que je l’apprécie Michelle. Et je sais que son départ approche. Je sens que ça va être dur, très dur. C’est à elle que je me confie à chaque « coup de mou », c’est avec elle que je vais digérer chaque soir, le long de

la Seudre.

Dans quelques minutes, je vais rencontrer le docteur Guiot pour la première fois depuis que je suis rentrée ici. J’appréhende un peu ; je me demande ce que je vais bien pouvoir lui raconter. Un entretien de dix minutes, c’est si court pour faire le tour de tout ce qui ne va pas. Par où commencer ? Sur quoi mettre l’accent ? J’espère simplement qu’il me posera des questions plutôt que de me dire « alors ? ». J’ai tellement de mal à exprimer ce qui ne va pas oralement, j’ai toujours l’impression de ne pas faire passer ce que j’aurais voulu faire passer après coup. Une fois le psy parti, je me dis toujours, « mince, j’ai oublié de dire ceci ou cela ! ». Enfin, je vais voir comment ce premier entretien va se passer. Peut être que je m’inquiète simplement pour rien et que se déroulera pour le mieux. J’ai toujours tendance à stresser devant le nouveau, l’inconnu.

Cette première entrevue a enfin eu lieu, pas de panique, tout  s’est bien passé. S’est ensuite déroulée la séance avec la psychologue, un peu déroutante je dois dire. En fait, c’était la première fois que je parlais à une psychologue et j’avoue que ses questions m’ont un peu déroutées. Une en particulier est revenue trois fois. Pas une question à vrai dire, mais plutôt une suggestion :  « Parlez-moi de vous ». J’ai été complètement prise au dépourvu, dépassée, je ne m’attendais pas à ça. Que dire de moi, comme je n’ai aucune confiance en moi et encore moins d’estime de moi, j’aurais tendance à dire qu’il m’y a pas grand-chose à dire sur moi. En fait, je ne suis pas grand-chose, juste un être qui essaie de sortir d’une galère dans laquelle il s’est fourré je ne sais comment.

Mais si je devais approfondir ce fameux « parlez moi de vous », je dirais que je suis une jeune adulte, qui a vécu une adolescence cauchemardesque, bourrée de complexes, complexes appuyés par le regard des autres, certaines remarques, souvent blessantes à mon égard. Combien de fois ai-je entendu, même au sein de ma propre famille « et bien dis donc, on mange bien à la cantine » ou encore « on vois que tu as hérité du nez de ton père,,  il ne peut pas te renier ! ». Aux yeux de ces personnes, ces commentaires peuvent paraître drôles, anodins, ça amuse bien la galerie sur le coup mais moi, cela me blessait profondément. Et j’encaissais, j’encaissais… et noyais tout ce chagrin et cette honte de moi dans mes gâteaux.

Ces troubles de mon comportement alimentaire ont commencés très jeune. Les premiers souvenirs que j’en ai sont les trajets qui me menaient du collège à chez mon papi. Sur la route se trouvait un Intermarché et je me rappelle très bien m’y être arrêtée maintes et maintes fois sur le chemin pour acheter à manger. Et pas n’importe quoi : toujours des « Kinder délices ». Je dévorais ces gâteau sur la route en prenant soin de me débarrasser des papiers. Et à l’arrivée, mon goûter m’attendait, encore des gâteau et du coca. A cette époque déjà, j’étais bien boulotte et essuyais souvent les commentaires, même ceux de mon grand-père, qui d’un côté me fournissait ma « drogue » à volonté (« tu en veux d’autres, bouge pas, papi va t’en chercher ») et de l’autre n’hésitait pas à faire des commentaires dus à mes rondeurs. Comment voulez vous qu’une gamine de dix ou douze ans fasse la part des choses et se rende compte que quelque chose ne va pas.

On m’a souvent dit que mes problèmes de« bouffe » étaient certainement liés à l’enfance. Ai-je été traumatisée ? Je ne m’en rappelle pas. A dire vrai, j’ai très peu de souvenirs, quelques bribes. Ce qui me bouleverse un peu c’est que lorsque j’y pense et repense, les seules souvenirs que j’aie ne sont que des mauvais. Je n’ai pas réellement de bons souvenirs d’enfance, souvenirs de famille. Par exemple, je me rappelle d’un après midi ou ma cousine était venue jouer à la maison avec moi. Ce jour là, mon père, féru de chasse et de pêche avait décidé de nous apprendre à tirer avec une carabine à plomb dans une cible qu’il avait fabriqué. Je n’en avait aucune envie mais ma cousine, elle, s’est prêté au jeu. Quand est venu mon tour, j’ai un peu rechigné et tiré à côté. Quand mon père m’a dit de recommencer, je me suis trouvée réticente et lui ai dit que je préférais aller jouer avec ma cousine à autre chose. Je ne sais plus comment cela s’est produit mais ce dont je me rappelle, c’est d’avoir pris une raclée ce jour là ; une raclée parce que je ne voulais pas jouer au garçon.

Au fond, je pense que mon père aurait préféré avoir un garçon, avec qui partager ses passions, plutôt qu’une fille, beaucoup plus proche de sa maman. Mon père et moi n’avons jamais été très proche et avons toujours eu des problèmes de communication. Jamais je ne me souviens m’être confiée à lui pour quoi que ce soit. Encore aujourd’hui, nos discussion et rapport, je trouve, ne sont pas ceux d’un père et d’une fille. Je n’ai non aucun souvenir de mon père m’ayant dit qu’il m’aimait. Il m’a un jour dit quelque chose dont je me souviendrais toujours : « Tu sais, après ta mère, tu es la personne la plus importante ». Un parent n’est-il pas censé faire passer son enfant avant toute chose ? En tout cas, c’est le discours que j’ai toujours eu de ma maman, je j’étais ce qu’elle avait de plus cher, sa fierté, ce qu’elle avait le plus réussi.

Un autre souvenir m’a longtemps hanté, et a souvent été source de cauchemars. à un certain stade de leur relation, mes parents se disputaient souvent et , je restais dans ma chambre, comme si de rien n’était, essayant de faire impasse des cris, surtout ceux de mon père. Mais un jour, je me rappelle qu’ils étaient dans le garage, que mon père criait et que ma mère pleurait. J’ai eu très peur et suis sortie de ma chambre pour aller au garage, au secours de maman. Et là, papa la cramponnait par les cheveux. Je me souviendrais toute ma vie le regard de terreur qu’a eu ma maman ce jour là. Et j’ai crié à mon père de la lacher,ce qu’il a fait. Après, trou noir, je ne sais pas comment cela s’est terminé, je ne m’en souviens pas.

Les bons souvenirs, je les cherche. Ceux que j’ai pu avoir, je les ai souvant eu seule. Car j’étais une enfant solitaire. Je passais mes mercredi seule à la maison, où je jouais au papa et à la maman, à la maitresse, à la secrétaire. Le moment du gouter reste aussi pour moi l’un des meilleurs souvenirs de ma jeunesse. Est-ce normal ? Je devrais en avoir plus, non ?

Ma maman le week-end, partait souvent à la plage et déjà, je refusais d’y aller. Le complexe du maillot, à 9-10 ans était déjà là. Alors je restais à la maison, à jouer, seule.

Je me souviens aussi que chaque soir, en sortant de l’école, comme je l’ai déjà dit, je rentrais chez mon grand-père, qui vivait tout près du collège. Et combien de fois ai-je attendu que ma maman débauche… C’était souvent très tard, trop souvent d’ailleurs. Passé une certaine heure, lorsqu’elle arrivait, je me mettais à l’engueuler, parce que j’en avais marre d’attendre tous les soirs, souvent jusqu’à 19h30, qu’elle débauche et vienne me chercher. J’avais fini mes devoirs depuis longtemps et trépignais, attendais son retour.

En parlant de devoirs, contrairement à beaucoup d’enfants, je n’ai jamais eu l’aide de mes parents. Je ne le leur reproche pas, non, parce que je me débrouillais bien seule, mais des fois, ça m’aurait plu d’entendre dire « as-tu des soucis avec tes devoirs ? », plutôt que « j’epère que tu as fini tes devoirs !! ». A l’école, j’ai toujours eu des notes convenables et je me rappelle que ma mère me disait toujours que si je redoublais, j’irais en pension. Peut être qu’inconsciemment, c’est ce qui m’a boosté pour rester à niveau scolairement parlant.

En ce qui concerne les garçons, à l’âge ou les petites filles ont des chéris (je parle de la maternelle et la primaire), moi, je n’en ai jamais eu, j’étais la grosse, la moche, la bigleuse qui louche, rien de plus. Déjà, jeune, je détestais les récréations, lieu de rassemblement des copains, ,moment où l’on est à découvert, loin de son pupitre d’ écolier. Au collège, pis encore, je restais dans les couloirs au moment des récréations, je ne me montrais pas souvent. Il y avait souvent ce jeu,  « action ou vérité ». Je me rappelle une fois y avoir joué et quand est venu mon tour, on m’a demandé si j’étais déjà sortie ave un garçon. Evidemment que non, et les autres s’en doutaient, alors j’ai refusé de répondre, ne laissant aucun doute sur la réponse. Quand j’y repense, je me dit que les ados peuvent être d’une telle méchanceté entre eux, c’est dingue ! Des histoires de cette même acabit, j’en ai un paquet en réserve mais je n’aurais pas assez de pages pour toutes les raconter !

Après le lycée est venue la fac. La première année à été une horreur pour moi, socialement parlant. C’est d’ailleurs pour ça que j’ai eu de si bonnes notes ! Je n’avais aucune vie sociale, une seule amie (amie qui comme par hasard a souffert des mêmes troubles que moi). Comme quoi le dicton qui dit que qui se ressemble s’assemble est bien vrai. En cours, je participais peu, au cas où on me remarquait. Je ne fréquentais pas la bibliothèque, trop de monde. Pour arriver en cours chaque matin, jamais je ne passais pas l’entrée principale, toujours par les petites portes dérobées, histoire de voir le moins de foule possible. Les amphis, j’y étais toujours avant tout le monde, de sorte qu’on ne me voie pas entrer et qu’on ne me scrute pas du regard.

Côté nourriture, c’est lorsque j’ai commencé à vivre seule que tout s’est empiré. Je me faisais mes propres courses, était tranquille dans mon petit studio pour mener à bout mes crises. C’est d’ailleurs à cette période qu’ont commencé les vomissements, il y a de ça quatre ans. Combien de fois me suis-je retrouvée à découvert, obligeant ma maman à mettre la main au porte monnaie. Je faisais des courses tous les jours. J’avais même honte souvent de passer aux caisses avec le contenu de mon caddie. Je savais, du moins je me doutais que la caissière n’était pas dupe. Sur le tapis : gâteaux, glaces, céréales, chocolats, et quelques légumes, pour donner le change.

Tous ces souvenirs, je souhaite qu’ils ne restent que des souvenirs. Je veux désormais aller de l’avant, en finir avec tout cela. J’ai déjà été hospitalisée ici, il y a quatre ans. Seulement cette hospitalisation, je ne l’avais pas prise au sérieux. Je passais mon temps avec les connaissances que je m’étais faite, à fanfaronner. Cette fois ci, c’est différent, je mise tellement sur mon séjour ici, que je veux profiter de tout à fond. Une patiente, elle aussi boulimique m’a prété un ouvrage hier, que j’ai lu d’une traite « La boulimie, sortir de l’engrenage ». J’ai eu l’impression que ce livre retraçait mon histoire : mêmes symptômes, même comportements J’ai honte de le dire, mais pour assouvir certaines de mes crises, il m’est même arrivé de voler, par manque d’argent et surtout par besoin irrépressible de me remplir. En lisant cet ouvrage, je me suis rendue compte que beaucoup de boulimiques volaient pour manger ; cela m’a aidé à déculpabiliser un peu.

Ce matin, j’a ma première séance de sophrologie avec le docteur Guiot. J’espère en tirer profit, moi qui suis toujours très angoissée et anxieuse. C’est pour ça que je me suis aussi fait prescrire la relaxation, histoire d’apprendre à me détendre et penser à autre chose qu’à mon corps, mon image et à la nourriture.

Hier, j’ai aussi été à ma première douche. Ça a été un réel pas en avant car l’épreuve du maillot pour moi est vraiment quelque chose de difficile. Mais beaucoup de patient m’ont encouragé en me disant que ces dames en voyaient à la pelle. Au début, quand je suis entrée dans la salle et ai ôté mon peignoir, j’ai ressenti la honte de mon corps trop potelé. Mais la dame n’a pas semblé en faire cas, alors je me suis mise en place et quel bonheur ces jets d’eau ! Désormais, même si cela me coute d’y aller, c’est un effort que je referrais, car le jeu en vaut la chandelle.

Pour la piscine, peut être vais-je tenter celle de l’établissement, bien que le prix soit assez élevé, mais pour un début, ça pourrait être pas mal, avant de me lancer dans le grand bain de celle de Saujon. Je dis ça, mais aurais-je le courage d’y aller ? Dans l’immédiat, je ne pense pas. Il va me falloir travailler encore beaucoup sur moi-même.

Aujourd’hui, jeudi 02 août, pile poil huit jours après ma dernière crise, j’ai récidivé. Je n’aurais tenu qu’une misérable semaine. Il y a trois jours, Michelle m’a annoncé qu’elle quitterait la clinique ce vendredi, et David, autre personnage auquel je m’étais attaché avait lui aussi prévu son départ ce jour là.. Les deux seules personnes avec qui j’ai eu des affinités, mes deux voisins de table s’en vont. Je vis cela, inconsciemment me l’a dit sylvain comme un abandon. J’ai donc passé ma journée très angoissée et me suis isolée dans ma chambre en fin d’après midi pour me goinfrer. Plus rien ne comptait, mis à part ce que je me mettait dans le gosier ; et ce tout en pensant, qu’est ce que je vais me sentir seule ! En descendant prendre mes médicaments à 19h00, je demande à Sylvain si je peux m’entretenir avec lui, histoire de tout lui confesser. Cela tombe bien, il avait prévu un entretien avec moi ce jour même à 20h00. Après le repas donc, nous avons longuement discuté et je lui ai confié ma détresse face au départ de David et Michelle. Je sais que nous resterons en contact et nous reverrons mais c’est pour moi une épreuve douloureuse. Je m’entendais si bien avec eux. Au moment où j’écris, ou plutôt tape ces mot, je n’ai envie de parler à personne, ne plus tisser de liens avec qui que ce soit ici, non. Je veux m’isoler, rester  seule. J’annonce à Sylvain que demain midi, je n’irai pas en salle à manger. Trop dur, me retrouver seule, entre deux tables vides, je ne veux pas l’affronter. Je ne pense pas non plus assister à la séance de sophrologie du docteur Guiot demain matin. En fait, j’aimerai passer ma journée cloitrée, isolée, à dormir même, histoire de me remettre de mon « chagrin ». je voudrais qu’on me laisse tranquille, pour une fois et qu’on évite de me dire que s’isoler n’est pas la solution. Car pour moi, ce sera ma solution.

Ce matin, vendredi, je vais un peu mieux, remise de toutes mes émotions d’hier. Mais je sais qu’aujourd’hui, je vais dire au revoir à Michelle et David, ombre au tableau. Dans 20mn, les portes de la clinique vont s’ouvrir et je vais aller m’aérer, effectuer une bonne marche avant le petit déjeuner. Vais-je aller à la séance de sophrologie, je ne le sais pas encore. Je sais que je devrais y aller, c’est pour mon bien, mais je ne sais pas, je n’ai toujours pas envie de voir du monde. En tout cas, pour le déjeuner, je ne reviendrai pas sur ma décision, je n’irai pas déjeuner en salle à manger. Je pense consacrer ces jours à venir pour faire un travail sur moi, approfondir mes séances avec Sylvain et Muguette, assister en élève assidue à tous mes ateliers et surtout, me plonger dans mes lectures ; lectures que j’aime tant. Je suis toujours sur le « pavé » de Jean Michel Cohen. Ce livre est vraiment très bien et traite de ce dont je souffre. Plus que 150 pages et j’en viendrait à bout, pour me plonger dans un autre…

Voilà, je suis venue à bout de mon livre et en ai aussitôt entamé un autre. Qu’est ce que j’aime lire, me cultiver ; mais ça, ce ne sont que des détails. Michelle et David sont bel et bien partis et comme je suis allée assister à la séance de sophrologie du docteur Guiot, je n’ai pu leur dire au revoir. Au cours de cette séance, impossible d’entrer dans « le jeu », trop nerveuse, trop tendue. J’en ai parlé au docteur par la suite en entretien et il m’a dit que ça allait venir. Je lui fais part de mes angoisses faces au départ de mes amis et il essaie de trouver les mots pour m’apaiser, me dit que ce n’est qu’un au-revoir, et non des adieux. Le départ de Michelle surtout m’affecte. Je m’était vraiment attachée à elle. Nous sommes lundi matin et depuis jeudi soir, je n’ai fait que faire des crises, des orgies alimentaires, pour combler ce vide en moi, ce vide que me cause « l’abandon » de Michelle. Mais je sais qu’elle va mieux, qu’elle doit renter chez elle et qu’elle aussi à beaucoup de choses à régler. Hier, dimanche donc, j’ai dormi toute la journée. Je devais vraiment être fatiguée ! je me suis levée à 11h00 et me suis préparée en vitesse avant que la femme de ménage arrive et suis sortie lire au soleil et dès la fin du repas, je suis allée demander un lyxanxia 40 à sylvain, histoire de ne pas faire de bêtises. Pourtant, je n’ai pu m’empêcher de manger tous les fruits que j’avais, soit un bon kilo de raisin et plusieurs nectarines. Bien que ce ne soient que des fruits, je ne supporte pas de savoir ce volume d’aliment dans mon estomac, alors j’ai du les rendre. Je me suis ensuite allongée et endormie jusqu’à ce que le téléphone sonne à 19h30 et que Sylvain me dise de descendre prendre mes médicaments et ensuite mon repas.

Ce matin, j’ai décidé qu’une nouvelle semaine s’annonçait et que je voulais partir sur de bonnes bases. Comme d’habitude, il est 4h30 et je suis debout ! Comme chaque lundi, je vais monter sur la balance et ce matin j’ai peur, peur de voir le chiffre de la semaine dernière supérieur ; et ce serait bien légitime après tout ! Ne suis-je pas celle qui s’est empiffrée ces derniers jours ? et bien si, alors je n’ai qu’à m’en prendre qu’à moi-même. Mais j’aimerai tellement un miracle… Pour cette semaine, je me fixe un défi, une sorte d’objectif : pas de crise. Je n’ai plus rien « d’interdit » dans mes placards, si ce n’est quelques fruits et compotes. Je vais me fixer comme but d’avoir une semaine exemplaire niveau alimentation. Vais –je tenir ? je ne sais pas, je l’espère.

J’ai rencontré Elisabeth, qui est arrivée il y a quelques jours et je la trouve vraiment sympathique. Karine, une nouvelle arrivante m’a l’air aussi d’être quelqu’un de bien. Du coup, je suis revenue en quelque sorte sur ma décision. A quoi bon s’isoler ? Non, je vais un peu plus vers les autres, et ça me fait du bien. Après tout, pourquoi ne pas créer de nouvelles amitiés ? Cela m’aidera sûrement plus dans mon combat contre la boulimie plutôt que de me cloîtrer dans ma chambre à dormir ou lire.

En fin de semaine, j’ai eu ma deuxième séance d’atelier psycho corporel avec muguette. Je m’attendais à une discussion, comme lors de la séance précédente. Mais lorsque je l’ai vu se diriger vers l’ascenseur, je lui ai demandé : « nous n’allons pas au bureau des entretiens ? » ; et elle m’a répondu : « tu veux faire ça sur le bureau ? » ; Et là, j’ai réalisé que nous allions passer à la phase pratique de cet atelier. Nous avons donc rejoint une salle où, si mes souvenirs sont bons, était affiché sur la porte « atelier mieux aimer son corps ». Dans cette salle, il y avait une table de massage. Muguette m’a alors dis : « tu gardes ton jean mais tu quittes t-shirt et soutien-gorge. Je me suis soudain sentie stressée, un peu angoissée et me suis exécutée, mais sans me presser. Ça m’a fait très bizarre de me retrouver « seins à l’air » face à elle, bien que ce soit une femme et qui plus est une infirmière. Je me suis allongée sur la table. Elle elle a commencé à me masser tout le dos ainsi que les épaules, les bras et le pieds avec des huiles essentiels. Et là, la pression est redescendue, je me suis sentie plus à l’aise. Ce fut un réel bonheur. Cela a duré une bonne vingtaine de minutes ensuite, je me suis rhabillée ; terminé. Elle m’a demandé de lui donner mes impressions avant, pendant et après la séance. Après, je me suis sentie beaucoup plus détendue, sereine. J’espère avoir un autre atelier de « pratique » !

Pour changer complètement de sujet, la psychologue m’a dit lors de notre dernier entretien, en rigolant, qu’avec ma frénésie d’écriture, je pourrais bien écrire un livre. Je ne lui ai pas dit sur le moment mais il est vrai que j’y pense depuis longtemps. Après tout, je suis la première à aimer lire sur le malheur des autres. Peu avant d’entrer à la clinique, j’ai lu d’une traite le livre de Justine : « le jour où j’ai décidé d’arrêter de manger ». J’ai toujours aimé lire et écrire. Et l’un de mes rêves, si je peux appeler ça un rêve ; non, plutôt, l’une des choses que me tiendrait beaucoup à cœur serait d’écrire un livre. J’ai longtemps hésiter à me diriger en lettres modernes plutôt qu’en LEA. Mais mon amour pour les langues étrangères l’a emporté sur celui de la langue française. Mais la lecture reste l’un de mes passe temps favoris. Et sans aucune prétention, je pense avoir une bonne qualité d’expression. Enfin, chaque chose en son temps, non ?

Honteuse de mes « excès » de ces derniers jours, je me suis fixée l’objectif de passer une semaine exemplaire, exemptée de crises et goinfrage, il faut aussi que je bouge mes fesses. Il me reste toujours ces kilos à perdre et ce poids de forme à atteindre. Et pour l’instant, je suis mal barrée !! Je n’avais perdu que cent grammes la semaine précédente, cent grammes que j’ai certainement repris depuis ! Déjà trois semaines aujourd’hui que je suis là, et sincèrement, j’estime ne pas avoir fait de réels progrès. Certes, je me suis beaucoup confiée, Que se soit à Sylvain, Muguette, le docteur Guiot ou la psychologue, mais niveau crises et poids, zéro, rien.

Aujourd’hui (lundi), pas de crise, pas d’angoisses particulière. Bon, comme d’hab, debout à 4h30, mais je n’y peu rien, je suis sur le qui vive. Ce matin, dès mon réveil, j’ai faim et soif, surtout soif. Non, pas question de boire, je suis de pesée ce matin. Alors je prends mon mal en patience et pianote frénétiquement sur ce petit clavier qui est devenu lelien entre mes pensées et le papier. A 7h00, j’ai bien tenté sans grand espoir de convaincre l’une des infirmière de me laisser avoir accès à la balance, justifiant de ma soif. En vain, je me suis entendue dire que la pesée ne serait pas avant 8h00 et qu’il fallait que j’arrête avec cette obsession de pesée. De quoi elle se mêle celle-là ? Est-elle dans ma tête ? Quand elle veut j’échange sa place avec la mienne. C’est sans aucun regret que je troquerais avec elle ce que j’appellerai mon calvaire, me angoisses, et par dessus tout, mes complexes. Bref, c’est sans appel, je dois attendre 8h00 et basta. Déjà en tenue de « sportive », je m’esquive dès l’ouverture des portes pour me tenter un petit jogging. Impossible, le ventre vide, pas moyen de dépasser les

400 mètre

. J’ai alors décidé de marcher. Je n’aurais parcouru que 2 malheureux kilomètres, stoppée par la pluie. Dans ce petit parc où j’aime aller me défouler le matin, j’ai croisé ce matin une nouvelle patiente, de toute évidence anorexique, ça ne fait pas un doute. Même habillée, elle fait peur à voir, j’ai mal pour elle sur le coup. Quand j’arrive dans le parc, elle en est à son sixième tour ; « plus que quatre me dit-elle ». Elle, la pluie ne l’a pas arrêtée, malheureusement.

Après cette petite mise en jambe, j’ai même eu le temps d’aller prendre ma douche avant d’avoir enfin droit au sésame, l’accès à la salle des entretiens, où siège la fameuse balance. Avant de monter, j’ai peur ; je sais que mes crises incessantes depuis jeudi soir n’auront certainement pas été bénéfiques. Je me remémore le chiffre de la semaine précédente : 57,6 kgs. Je monte sur la balance et là, ouf ! Elle affiche un 57 tout rond. Je suis à la fois soulagée et extrêmement déçue. Si j’avais pu contrôler mes pulsions ces derniers jours, peut-être aurait-elle indiqué un chiffre inférieur.

Depuis dimanche, jour de ma dernière crise, je dors beaucoup.je sais que le psychiatre n’est pas trop d’accord, mais c’est le seul moyen que j’aie trouvé pour ne plus penser. Ces angoisses qui pourraient survenir à n’importe quel moment me font peur. Je sais pertinemment que je choisi la solution de fuite. Mais pour l’instant, c’est une solution d’urgence. Quand je dors, je ne pense pas, je ne mange  pas, je ne vomis pas et ne m’en veux pas.

Ce soir, j’ai eu un coup de fil de véronique, la maman de Claire, une ancienne anorexique rencontrée dans cette clinique lors de ma première hospitalisation. Ça m’a réellement fait plaisir de parler avec elle. Elle m’a aussi passé Claire, qui est descendue de Paris pour quelques jours et va venir me voir. La conversation a essentiellement tourné autour de ma maladie. Elle voulait savoir comment j’allais, prendre de mes nouvelles. Véro, je l’adore, elle est tellement gentille et compréhensive ! Sa fille étant passée par là, elle, au moins, comprends dans quel état je suis et que ce n’est pas un caprice.

Pour ma famille, c’est complètement différents. Ils ne comprennent rien, ou plutôt, ne veulent rien comprendre. Au bout du fil, j’entends sans cesse : «  quand est ce que tu sors de ta clinique, tu ne vas pas faire comme ta mère, qui fait hospitalisation sur hospitalisation ». pour mon père, pareil, lui, c’est plutôt : « on n’en parle pas, tu c’est ce que j’en pense de ces endroits et compagnie ». Et moi, j’aurais une envie démesurée de leur dire « merde, si vous n’êtes pas capable de comprendre, et bien taisez vous plutôt que de me sortir des conneries ! ». mais je n’ose pas. Je ne veux pas blesser.

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19 novembre 2007

Par où comencer?

Par où commencer? Commennt ouvrir le discours? Je ne sais pas trop en fait. Je me décide seulement maintenant, en novembre 2007 à écrire ce blog. Pourtant, il y a un tas de trucs, même des millions de trucs que j'aurais pu vous dire si j'avais commencé ce blog il y a plusieurs mois, voire quelques années. Je vais donc essayer de rattrapper le temps perdu, vous en dire un peu plus sur moi, ce qui me travaille, comment ça a commencé, l'hospitalisation de cet été, et tout ce qui s'est passé durant cette période. J'espère que vous êtes bien accrochés à vos lunettes et que surtout, vous n'êtes pas préssés...

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Une faim sans fin
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